Au club AOC (Association Oenologie et Culture), c'était la rentrée la semaine dernière, avec comme thème pour l'occasion les "coups de coeur des adhérents". Ainsi, chacun était invité à rapporter "la bonne bouteille des vacances" pour en faire profiter les copains... à l'aveugle, évidemment !

Personnellement, j'adore ce type de soirée. Déguster à l'aveugle, c'est toujours ludique (on a envie de trouver ce que c'est !), cela permet de goûter des vins sans a priori aucun. Ce qui remet souvent des choses à leur juste place (on peut être très déçu par une soi-disante belle bouteille onéreuse et a contrario craquer sur un supposé "petit vin" payé quelques euros). 

Comme toujours, l'accueil est super. Pain frais, charcuteries, salades et fromages de caractère sont disposés. A moi d'animer la soirée, en donnant quelques conseils de "méthodologie" pour mieux déguster à l'aveugle, cet exercice si périlleux tant gustativement (on ne reconnaît que ce l'on connaît) qu'intellectuellement (on procède aussi par élimination, en s'appuyant sur ses connaissances).

Je vais vous parler des 6 vins qui m'ont procuré le plus d'émotions.

A commencer par ce vin de pays du Val de Loire 100% sauvignon gris du Domaine de Belle Vue ! Des vins de Jérôme Bretaudeau, je connaissais essentiellement ses FA-BU-LEUX muscadets que j'avais eu l'occasion de découvrir à la Dive Bouteille. Je m'étais pris alors une baffe MO-NU-MEN-TALE !


J'ai tout autant adoré ce vin. C'était d'ailleurs la première fois que je goûtais un 100% sauvignon gris ! Nez exubérant, jolies notes végétales et de pamplemousse au premier nez, suivies d'arômes de grains de raisins bien mûrs et de fruits exotiques. En bouche, c'est frais et tendu, avec une belle trame minérale et surtout de beaux amers en finale. Première belle émotion !
 
On continue avec un autre blanc, tout aussi déstabilisant au premier nez... qui évoque le bacon grillé ! (si, si... non, non, je n'ai rien fumé...)

Si d'habitude, je ne suis vraiment pas fan des vins "boisés", force est de constater que l'élevage en barrique (neuve, j'imagine) apporte une certaine singularité à cet Auxey-Duresses 1er cru "En Reugne" de Pierre Boisson (le fils de Bernard, du célèbre domaine Boisson-Vadot à Meursault).  


Notes empyreumatiques prononcées (bacon grillé, torréfaction), finale sur les épices (poivre). A l'aveugle, l'élevage a tendance a prendre le pas sur le cépage chardonnay, qui est difficilement reconnaissable de prime abord. Mais il faut l'avouer, c'est très bon, même si ce n'est pas vraiment ma "came" en matière de vin blanc (que je préfère ciselé et sans fard). Après, la question est de savoir si le vin perdra ses arômes toastés avec le temps, laissant le terroir s'exprimer pleinement. Sachant qu'il a déjà 4 ans, j'avoue que j'ai des doutes...

On passe aux rouges, avec une super découverte, car c'était la première fois que je dégustais un vin 100% piquepoul noir avec cette cuvée Tentation du Domaine La Grangette.

Si l'on connaît davantage son homologue blanc (AOC Picpoul de Pinet, créée en 1985), parfait avec des huîtres de l'étang de Thau, il est rare d'avoir l'occasion de goûter des vins issus de ce cépage, d'autant plus en rouge (car il est souvent utilisé pour l'élaboration de vins rosés). Il faut dire qu'il ne reste plus aujourd'hui qu'une soixantaine d'hectares dans le Languedoc, sa terre d'origine (contre 357 ha en 1958). Et que ce domaine est le seul à produire du piquepoul dans les 3 couleurs !
 

Voilà un vrai rouge d'été ! Ses arômes de p'tits fruits rouges (cerises, groseilles, framboise), en veux-tu en voilà, accompagnés de jolies notes végétales (ronce) en fond le parfait compagnon d'un pique-nique improvisé ! Servi à 12° environ, ça glisse tout seul dans la gorge... Zut, la bouteille est déjà finie...

On poursuit avec un autre O.V.N.I. (Objet Viticole Non Identifié) : les Terres Salées (version rouge) de Christophe Barbier, ou l'histoire d'une vigne de merlot plantée en franc de pied sur un hectare d'anciens marais salants au pied du massif de La Clape. Le sous-sol étant donc salé, la parcelle est inondée l'hiver pour faire pression sur la nappe salée et éviter les remontées de sel.
 

Forcément, à l'aveugle, tu pars sur un Bordeaux. Mais tu as quand même un doute. Le vin est très bien construit, velouté, belle mâche, les tanins sont soyeux, on perçoit une légère note iodée. Le nez est superbe. Rien qu'a penser à l'association avec un tournedos saignants accompagnés d'haricots juste sautés à la poêle, j'ai les dents du fond qui baignent...

NB : pour en avoir vendu, je connaissais déjà les excellents vins de ce vigneron. Je ne peux que vous inviter à goûter aussi la version en blanc, 100% bourboulenc (et toute sa gamme de Languedoc La Clape et de vin de pays) !

 
 
"ça, c'est du sud-ouest ! Du braucol  !". Dans le mile, Emile !

Ou plutôt du "mansois" puisque nous sommes non pas à Gaillac, mais à Marcillac (on l'appelle aussi Fer Servadou ou Pinenc selon les coins dans le Sud-Ouest). Au Domaine du Cros, l'un des rares domaines connus de cette petite appellation de l'Aveyron.

Robes foncées aux reflets pourpres. Notes végétales (poivron mûr), arômes de cassis, myrtille et framboise, finale épicée. Pas de doute, c'est bien du mansois, cousin lointain du cabernet franc. Ce vin issus de vignes de plus de 50 ans, élevé en foudre, est déjà délicieux à présent, mais se conservera 8-10 ans sans problème.

On termine avec "ma" bouteille.
 

Pic de Vissou, la grande cuvée en rouge du Mas Coris de Véronique et Jean Attard, néo-vignerons installés sur le terroir de la toute jeune AOP Cabrières (rosé par nature, rouge par culture).
 

Le Pic de Vissou, depuis leurs vignes...

Millésime 2010, leur premier. Assemblage de syrah, grenache et cinsault. Robe d'un noir profond. Nez un peu fermé de prime abord (vin à carafer !). Après aération, les notes de cerises noires, de café et de réglisse vous chatouillent les papilles. En bouche, "'y a du vin d'dans", comme on dit. De la mâche, une belle structure tannique, mais surtout de la fraîcheur et de l'équilibre. Bref, le meilleur ami de la côte à l'os au barbecue (aux sarments de vignes, of course !).

Ce domaine, je l'ai d'abord connu par Véro, copine facebookienne et fidèle d'entre les fidèles des Vendredis du Vin (lire son blog). Et j'ai eu la chance de tomber sur ses bouteilles chez un caviste l'été dernier à Cassis.

On peut apprécier une vigneronne humainement, mais ne pas aimer ses vins.

Ou aimer les vins, mais pas le vigneron.

Ou on peut apprécier beaucoup les deux. ;-)

Véro, Jean, un seul mot d'ordre : "keep on goin'!"
 


 

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